Mille femmes blanches est un roman écrit en 1999 par l’écrivain américain Jim Fergus. Ce livre (qui est une fiction) prend la forme d’un journal intime, celui de May Dodd, une américaine internée dans un asile psychiatrique qui participe en 1875 à une opération secrète du gouvernement. Ce dernier demande à des femmes perdues – emprisonnées, internées ou désespérées – d’aller sur les terres indiennes pour se marier à des cheyennes, afin de porter leur descendance. Cette expérience a pour but de satisfaire un accord confidentiel entre le président Grant et Little Wolf, chef des cheyennes, qui propose d’échanger mille chevaux contre mille femmes blanches…
Voyage au cœur des terres indiennes
Mille femmes blanches propose un voyage unique au cœur des terres indiennes. Vous prendrez d’abord le train pour sillonner l’Amérique, observant par la fenêtre les paysages qui se déroulent comme un long rêve étrange. Vous contemplerez à travers les yeux de May Dodd et ses camarades l’envol des oiseaux, les levers de soleil, les étoiles qui percent le ciel noir. Puis vous poserez enfin vos pieds en pleine nature ; vous découvrirez une nature respectée, chérie et intense. Le bois brûlé, les herbes aromatiques et médicinales, la terre mouillée sont autant de parfums qui parviendront à vos narines. Mais vous humerez aussi l’odeur du sang, les senteurs des corps réunis dans les tipis, les émanations de poudre et de peur, dans ces multiples terres que vous parcourrez, en écoutant le son des ruisseaux et le hurlement des coyotes. C’est dans ces multiples parfums, sons et paysages que naîtront toutes sortes d’histoires, de violence et d’amour, de sensualité et de découverte « Je respirai son odeur d’homme fort, semblable à une forêt d’automne. Les muscles de ses bras et de son dos donnaient l’impression de robustesse d’une maison aux murs solides. Le rythme de son coeur contre ma gorge me sembla le pouls de la terre elle – même ».
Un roman de femmes
Portant bien son nom, Mille femmes blanches est un roman de femmes. De femmes différentes, riches, sensibles, étonnantes. Si nous pourrions reprocher à Jim Fergus de distinguer plusieurs types de femmes de façon légèrement stéréotypée (la garçonne, l’intrépide, la guerrière, la timide, la muette…), le roman dresse cependant des portraits intéressants qui montrent que la femme n’existe pas mais qu’il y a mille sortes de femmes et mille façons pour elle d’évoluer. Certains personnages sont inspirants et vous transposteront. Les femmes posent d’ailleurs un regard acéré sur la condition humaine dans son ensemble. Certes, May Dodd, notre narratrice, partage un point de vue féministe souvent rafraîchissant « De même qu’ils redoutent les femmes qui expriment leurs désirs, les hommes dédaignent celles qui affichent leurs opinions, quelles qu’elles soient et quel qu’en soit le sujet » mais il y a également la figure féminine de la guerrière, majestueuse, incarnée par Phemie, une ancienne esclave noire, digne d’un roman de Toni Morrison. Ce personnage est une merveille qui vous donnera des frissons, par ses chants, ses convictions, sa soif de liberté et sa beauté « Mon histoire, celle que ma mère et moi avons vécue, est celle d’un peuple arraché à son pays d’origine pour être réduit à l’esclavage dans un territoire inconnu. De même, l’histoire des Cheyenne est celle d’un peuple exilé de ses terres, et massacré s’il refuse de se plier. Tu parles d’intégration ? D’assimilation ? Non, notre histoire commune a un autre visage : celui du meurtre, de l’expropriation, de l’esclavage ».
Rencontres et conflits entre cultures
Enfin, si Mille femmes blanches apparaît comme un somptueux voyage romancé, empreint de sensualité et de féminité, c’est aussi un roman qui pose des réflexions très intéressantes sur les cultures indienne et occidentale. Nos voyageuses s’amusent des similitudes qui existent entre les indiens et les blancs « De leur côté, ces messieurs sauvages donnent l’impression de passer un temps démesuré à paresser dans leurs tipis, à fumer et à palabrer entre eux… ce qui me pousse à croire que nos cultures, finalement, ne sont peut-être pas si différentes : les femmes font tout le travail pendant que les hommes bavassent » mais se trouvent également confrontées à des événements qu’elles sont incapables de comprendre, allant à l’encontre de leur éducation et de leurs convictions. Ainsi, ce livre pourra vous paraître violent : Jim Fergus ne joue pas sur le mythe du « bon sauvage » cher à Rousseau et expose la culture cheyenne et sioux telle qu’elle est, sans vous épargner les détails les plus brutaux. Si deux cultures peuvent se rencontrer, s’entendre, se fondre : n’existera-t-il toujours pas une incompréhension mutuelle ? Une réflexion est également développée sur la façon dont se construit l’Amérique occidentale, capitaliste et individualiste ; sur les vices que chaque société intègre en elle et sur les incohérences de chacun. Le roman de Jim Fergus tisse parfois une intrigue un peu simple, que l’on pourrait deviner aisément, mais ne perd pas en puissance et en intelligence.
Si vous vous intéressez à la culture indienne, ce voyage au cœur des terres cheyennes (encore éloignées des réserves créées par les américains au XIXe siècle) devrait vous satisfaire. Si vous aimez les romances, vous apprécierez cet aspect du livre bien que les histoires d’amour ne soient pas centrales. Enfin, si la question de l’altérité, des rencontres entre cultures vous passionne, vous ne pourrez qu’adorer Mille femmes blanches de Jim Fergus.
Si vous avez besoin d’une lecture pleine de suspense, dont on ne peut deviner l’intrigue, vous risqueriez d’être déçu puisque ce n’est pas tant l’intrigue que son déroulement qui nous intéresse. Si vous ne supportez pas les fictions écrites comme des journaux intimes, votre plaisir de lecture pourrait être gâché. Enfin, si vous êtes de nature extrêmement sensible et ne supportez pas les scènes de violence, préparez-vous psychologiquement ou passez votre chemin.
Vous choisirez un thé doux et fleuri pour accompagner votre lecture en dégustant de la tarte aux noix de pécan.
Titre et auteur | Mille femmes blanches, Jim Fergus |
Thèmes abordés | femmes, amour, culture, indiens d’amérique |
Édition | |
Format et pages | 512, petit format, à lire dans le métro mais lourd dans le sac ! |
Âge | A partir de 13 ans |
Prix | 7,80€ |
Avertissement | violence, guerre, meurtre, viols, pédophilie |
Où l’acheter | Chez votre libraire préféré. |
Toujours sur le thème des rencontres entre cultures mais de façon plus positive, découvrez Le plaisir ne saurait attendre de Tishani Doshi.
Centré sur un peuple asservi et la condition noire, n’hésitez pas à lire Beloved de Toni Morrison.
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Un échange Livre rangé le 31 mai 2017 dans les bibliothèques : Amérique, Amour, De 5 à 10 euros, Dès 12 ans, Dès 14 ans, Femmes, Guerre, Jim Fergus, Petits formats, Pocket, Sociologie, Traditions |
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Un échange
J’ai tellement, mais TELLEMENT envie de découvrir ce livre!
Et Toni Morrison que j’aime tant <3
11 août 2017 - 17 h 40 min
Votre parole est importante, merci de la partager avec nous