Dans les forêts de Sibérie est un carnet autobiographique de l’écrivain et insatiable voyageur Sylvain Tesson, publié en 2011. Le livre a été adapté (très librement) en 2016 au cinéma par Safy Nebbou. Dans ce livre, l’auteur raconte son séjour de six mois dans une cabane proche du lac Baïkal. Le village le plus proche se trouve à 120 kilomètres : l’ermite se livre alors dans un journal intime.
Poésies du paysage sibérien
Ouvrir Dans les forêts de Sibérie, c’est lever le rideau sur le théâtre de l’hiver dans la Russie glaciale. Dans un carnet tenu du mois de février au mois de juillet, vous observez les métamorphoses du paysage sibérien : d’abord blanchi, illuminé par l’hiver et ses cristaux de glace, le décor semble fondre au fil des pages dans une verdure nouvelle.
« L’hiver transforme toute chose en tableau hollandais : précis et vernissé. »
L’auteur vous emmène dans un monde de nature, d’animaux, de cabane réconfortante et vous révèle les tableaux en relief d’un univers inconnu, qu’il aime bien plus que la civilisation.
« L’amour monte en moi pour ces bois peuplés de cerfs, ce lac gorgé de poissons, ce ciel traversé d’oiseaux […] »
Voyage ou arrêt dans le temps
Le récit de Sylvain Tesson développe une temporalité toute particulière. Vous aurez la sensation de voyager dans le temps, puisque les saisons s’écoulent, les paysages se transforment, les mois défilent. Pourtant, dans cet univers loin des villes grouillantes, le temps semble s’être arrêté. Les journées, dans le silence des hommes et le chant des oiseaux, se répètent, inlassablement.
« Chaque jour s’écoule, miroir de la veille, esquisse du lendemain ».
Cela peut être une expérience lassante pour le lecteur, en particulier s’il n’a pas de goût pour la littérature classique : car dans ce nouveau monde où la productivité n’a plus sa place, le narrateur dévore des livres et cite des auteurs, réfléchit à ce qu’il a lu, s’interroge sur le monde… Il n’y a pas d’agir dans cette œuvre ; il convient de réfléchir, de contempler, d’oublier. C’est en cela que cette littérature inspire le lecteur.
« Le silence me revient, l’immense silence qui n’est pas l’absence de bruit mais la disparition de tout interlocuteur. »
Rupture et orgueil de l’ermite
Enfin, Dans les forêts de Sibérie raconte l’expérience de l’ermitage. Le narrateur, fuyant le tumulte des hommes, dresse un portrait pathétique et néfaste d’une humanité qui consomme, s’agite, se divertit perpétuellement — dans le sens pascalien du terme.
« Avec eux, tout ce que je crains disparaît : le bruit, la fierté d’être ensemble, la soif de chasse – bref, la fièvre des meutes humaines. »
Pourtant, si l’ermite se veut être un roi sans divertissement, le voilà bien obsédé par son ancienne vie, ses camarades détestables que sont les hommes, et la vodka — dont il n’existe aucune source naturelle miraculeuse et qui est bien un pur produit de l’odieuse activité humaine.
« Un jour, l’homme pénètre dans le bois. Les dieux se retirent. »
Ainsi, le récit pose un regard certes intéressant sur la condition de l’ermite mais exhale un profond parfum d’orgueil, qu’il n’est pas toujours agréable d’humer au fil des pages. Bien sûr, certains propos amers et sarcastiques peuvent faire sourire le lecteur mais cela peut aussi l’agacer quelques fois.
« L’ermite absorbe l’univers, accorde une attention extrême à sa plus petite facette. »
Si vous aimez les récits de voyage, qui mêlent découverte et contemplation, vous devriez apprécier ce livre. Si vous avez un goût pour les œuvres qui incitent à réfléchir sur l’humanité et ses vices, vous saurez savourer cet aspect du carnet de Sylvain Tesson. Si vous avez besoin de vous rafraîchir, une petite plongée dans le Baïkal en février devrait vous faire du bien !
Si vous recherchez un récit d’aventures, attention : Sylvain Tesson raconte sa vie dans une cabane en Sibérie, il ne parcourt pas la Russie. Si vous n’aimez pas les œuvres un peu amères, il se peut que vous ne supportiez pas le style de notre auteur.
Pendant votre lecture, vous apprécierez un thé noir, façon Earl Grey avec des petits gâteaux au pavot ou du pain d’épice (mais russe !).
Titre et auteur | Dans les forêts de Sibérie, Sylvain Tesson |
Thèmes abordés | Voyage, Russie, Littérature |
Édition | Folio |
Format et pages | 304 pages, petit format, à lire dans le bus |
Âge | Apprécié à partir de 14 ans |
Prix | 7,80€ |
Avertissement | R.A.S |
Où l’acheter | Chez votre libraire préféré (voir s’il est disponible) |
Du même auteur, découvrez L’axe du loup, coup de cœur du Libriosaure.
Si vous souhaitez continuer votre périple en Sibérie, découvrez A marche forcée de Slawomir Rawicz.
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4 échanges Livre rangé le 12 septembre 2018 dans les bibliothèques : Autobiographie, De 5 à 10 euros, Dès 14 ans, Folio, Introspection, Petits formats, Poésie, Russie, Témoignages, Voyage |
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4 échanges
j’avais adoré! comme je ne connais pas L’axe du loup, je note ce titre!
15 septembre 2018 - 11 h 45 min
Bonjour, je rejoins totalement votre expérience de lecteur sur ce livre, je l’ai moi-même chroniqué il y a quelques mois ; à l’époque j’avais sous-titré mon article « Qu’importe le flocon, pourvu qu’on ait l’ivresse » !
5 novembre 2018 - 23 h 00 min
un de mes coups de coeur, j’ai adoré cette lecture !
10 novembre 2018 - 14 h 05 min
Coucou ! Ce livre me fait de l’oeil depuis un moment déjà, je pense que ce pourrait être une lecture parfaite en attendant l’arrivée du Printemps !
23 février 2019 - 10 h 31 min
Votre parole est importante, merci de la partager avec nous